Récemment, un article très intéressant est paru dans La Libre Belgique: l’unitarisme tellement décrié par les politiciens et la presse vit chez les jeunes, même si ils ne l’ont jamais connu. La Belgique unitaire est pour eux quelque chose de naturel, d’évident. Cela prouve l’absurdité du fédéralisme linguistique et que le B.U.B. a raison !
Dans le texte de l’article, les commentaires subjectifs, voire biaisés et dénigrants sont mis en lettres italiques soulignées.
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La Belgique en pointillé
Vincent Rocour
Mis en ligne le 23/09/2009
Cela ressemble au Petit prince de Saint-Exupéry, mais ce n’est pas le Petit prince de Saint-Exupéry. Trois politologues de l’Université de Liège (ULg), Min Reuchamps, Geoffrey Grandjean et Elodie Flaba, ont demandé à 234 étudiants de dessiner la Belgique. Ces étudiants en sciences politiques, en sciences sociales, en communication et en droit n’avaient pas reçu d’autres indications. Ils savaient juste qu’après avoir achevé leur dessin, ils devraient répondre à un questionnaire imprimé au verso de la feuille distribuée au début du cours.
Un dessin vaut mieux qu’un long discours, avance l’adage populaire. Les chercheurs liégeois l’ont repris à leur compte. ” La carte mentale permet une grande liberté aux répondants, . Elle est intéressante, parce qu’elle fait appel à l’instinct . Elle est pourtant rarement utilisée en sciences politiques.” Une lacune qui va cependant être comblée. L’équipe liégeoise a, en effet, obtenu l’accord des autres universités belges – francophones et néerlandophones – pour reproduire l’exercice à grande échelle. ” On fera cela, à la rentrée 2010. On ne se cantonnera pas aux facultés de sciences humaines. Nous voudrions aussi faire l’exercice dans les facultés de médecine ou de sciences appliquées. Comme cela, on ne pourra plus venir nous dire que si on avait pris d’autres personnes, les résultats auraient été très différents. Ce sera très intéressant. On pourra voir si les néerlandophones et les francophones se font les mêmes représentations mentales de la Belgique .”
La première expérience, menée en décembre 2008 à l’ULg, a fait l’objet d’un livre, qui vient de paraître. Elle a révélé des résultats parfois surprenants. Une majorité des 234 étudiants, 144 précisément, se sont contentés de tracer – plus ou moins fidèlement – les contours de la Belgique. Cela veut donc dire que 86 étudiants y ont glissé des éléments plus symboliques. On retrouve ainsi 68 dessins affichant la frontière linguistique – ” ce qui tendrait à prouver qu’elle devient peu à peu une frontière d’Etat “. Soixante étudiants ont également placé Bruxelles sur la carte. Mais pas toujours à la bonne place : 38 d’entre eux la situent comme il faut, au nord de la frontière linguistique, les autres la mettent juste dessus.
Les cartes mentales ont été croisées ensuite avec les réponses au questionnaire. Cela affine les représentations des répondants. Les chercheurs ont, par exemple, constaté que les étudiants qui avaient dessiné la frontière linguistique se montraient en général davantage attachés à la Belgique fédérale. ” Sans doute parce qu’ils ont plus conscience des réalités politiques belges “, argumente le chercheur liégeois.
Car c’est un autre enseignement de l’exercice : les étudiants, qui n’ont pourtant jamais connu la Belgique unitaire, appréhendent souvent mal le fédéralisme. On constate, par exemple, que 20 % des étudiants interrogés ne savent pas que la Belgique compte davantage de néerlandophones que de francophones. On s’aperçoit aussi qu’un étudiant sur trois est favorable au retour de l’Etat unitaire ou, en tout cas, à une réduction de l’autonomie des Régions. Ceux qui connaissent l’opinion en Flandre savent pourtant qu’un tel retour en arrière est impossible. ” Le fédéralisme comporte, dans l’esprit de beaucoup de gens, deux sens négatifs : il est perçu tantôt comme le moins mauvais système, tantôt comme l’antichambre du séparatisme , argumente Min Reuchamps. Comme fédéralisme rime avec conflit, les jeunes s’imaginent qu’avant tout était apaisé. Mais ils n’ont jamais connu l’Etat unitaire. Ils ne comprennent pas toujours que c’est précisément parce qu’il y avait des conflits que le fédéralisme a été introduit en Belgique .”
Cela dit, le nombre de jeunes qui plaident pour un statu quo ou pour une adaptation du système actuel sont plus nombreux encore que ceux qui veulent le retour en arrière : ils représentent 45 % de l’échantillon. Quant à ceux qui veulent plus de compétences aux Régions, ils sont 11 %. Il n’y a donc pas qu’en Flandre que l’on retrouve des régionalistes affichés.
Min Reuchamps, Geoffrey Grandjean et Elodie Flaba, “Dessinez la Belgique. Comment de jeunes Belges francophones voient le fédéralisme”, les Editions de l’Université de Liège.
© La Libre Belgique 2009