LES MENSONGES DU WARANDE
L’ouvrage du groupe nommé « le Warande », un conglomérat de 15 nationalistes flamands, dont un banquier pensionné de la KBC, Remi Vermeiren, et deux vieux journalistes, Frans Crols de Trends et Marc Platel, devrait prouver que la Belgique est superflue, voire nocive. Il n’est pas étonnant que ce soient exactement ces trois personnes qui ont présenté le livre à la presse en se profilant comme « l’élite économique de Flandre. »
Le livre ressemble davantage à une propagande des partis nationalistes flamands, même si les auteurs nient catégoriquement avoir un lien avec le Vlaams Belang. Le lecteur attentif aura pourtant observé qu’ils évitent soigneusement de citer cet autre parti politique nationaliste flamand, la NVA…
Le groupe nationaliste flamand n’hésite pas à recourir à des mensonges afin d’essayer d’étayer ses dires. Qui plus est, Monsieur Vermeiren ne connaît même pas les rapports de sa propre banque. Ainsi, il est déclaré sans gêne que les transferts de la Région flamande vers les Régions bruxelloise et wallonne atteindraient ensemble plus de 10 milliards d’euros tandis que la KBC, dans une étude de 1999, revue en 2003, concluait à un transfert de 5,3 milliards d’euros (la FEB estimait les transferts à 2 à 3 milliards d’euros ; le B.U.B. avait observé que ces études ne tiennent pas compte des retours économiques). Le groupe du Warande passe évidemment sous silence que les transferts dans d’autres pays comme l’Allemagne sont trois fois plus élevés que ceux en Belgique (le B.U.B. a écrit un texte à cet égard en août 2004 que vous pouvez retrouver sur ce site sous cette rubrique). On oublie également que par exemple la province du Limbourg coûte beaucoup à la Région flamande, ce qui engendre des transferts inter-provinciaux, tandis que l’on n’en fait pas un problème (et nous non plus évidemment). En même temps, il est surprenant de constater que le groupe du Warande considère que les transferts vers sa propre capitale, Bruxelles, sont problématiques…
Ensuite, le club nationaliste flamand essaye d’esquisser un portrait apocalyptique de la Belgique en mettant l’accent sur le fait que nous ayons la plus importante dette publique et une très forte pression fiscale. Le système des retraites belge serait un des plus faibles dans l’Europe des 15 (avant l’élargissement).
Malgré cela, il est tout de même étrange que la Belgique appartient au top 5 des pays où le standard de vie est le plus élevé au monde selon les Nations Unies. La dette publique est la conséquence d’une mauvaise gestion de l’Etat pendant les années de crise dont les partis traditionnels (et scindés) sont justement responsables. Il est grâce à cette dette publique que la Région flamande a pu se développer pour devenir une région économiquement forte. En outre, les messieurs du Warande oublient que notre système fédéral avec ses six parlements et gouvernements, voulu par les flamingants et les wallingants, nous coûte très cher engendrant également cette dette publique élevée. La lourde pression fiscale constitue aussi une conséquence de ce système fédéral. Un million de fonctionnaires (d’un point de vue proportionnel, le double du chiffre en Allemagne) chargent en effet lourdement le budget de l’Etat. Il est vrai que notre système de sécurité sociale n’est pas bon marché non plus, mais il est aussi un des meilleurs de l’Union européenne car il offre le plus de protection aux faibles de la société (les personnes âgées, les malades, les chômeurs,…).
Le plus étonnant à ce livre est l’élément suivant: si nous pouvons croire le journal “Het Belang van Limburg (30.11.2005, p. 4; tout de même l’ancien journal de Marc Platel), le groupe du Warande aurait proposé l’unitarisme (vous lisez bien, l’unitarisme) comme première solution aux problèmes communautaires, “mais”, le groupe y ajoute aussitôt, « personne n’en veut ». Cela est évidemment un mensonge. Selon différentes études, dont un sondage effectué par la K.U.L. en 1999, il y aurait en Belgique au moins 2,5 millions de gens (un Belge sur quatre) qui seraient favorables au système unitaire, comprenant un gouvernement et un parlement, ou qui voudraient à tout le moins davantage de compétences pour l’autorité fédérale. Le problème est connu : les unitaristes et les fédéralistes d’union n’ont pas accès aux médias publics, une discrimination qui est actuellement attaquée par le B.U.B. devant le tribunal.
Le groupe perd toute sa crédibilité quand il affirme qu’ “il est temps de se débarrasser de la Belgique unitaire actuelle”. Quelle Belgique « unitaire » ? La Belgique actuelle n’est plus du tout unitaire depuis 1970. Elle est fédérale et même de plus en plus confédérale, raison pour laquelle elle fonctionne si mal que le groupe le prétend.
Le groupe de réflexion continue dans sa lancée en prétextant qu’une “Flandre” indépendante confirmerait une évolution européenne. On invite tout de même ce groupe à expliquer sur quoi serait basé cette évolution. Nous pensions que l’Union européenne servait à rassembler les Européens et à placer les économies des Etats membres au même niveau et non que le but serait se scinder les pays qui font partie de l’U.E..
Par ailleurs, le groupe avance encore l’argument fallacieux selon lequel le conglomérat de “Wallo-Bru” se soignerait mieux lorsque la “Flandre” arrête tous les transferts vers elle. On peut difficilement s’imaginer une vision plus égoïste et plus asociale. Comme le nord de la Belgique a tout intérêt à avoisiner un sud prospère, il serait par contre indiqué que les liens soient resserrés et que la solidarité entre les régions soit augmentée parce que tous les investissements refluent dans une large mesure et bénéficient à toute l’économie nationale et européenne.
Le groupe déclare aussi que “les petits Etats sont plus performants que les grands”. Bien. Cela plaide donc en faveur de la Belgique ou considèrent-ils notre Etat de 30.000 km² comme un mastodonte ?
Enfin, cette évolution vers un « Etat flamand » doit se faire démocratiquement. Veulent-ils dire que l’on va enfin interroger la population belge dans un référendum au lieu de réformer systématiquement l’Etat sans interpeller ses citoyens comme cela se passe depuis 35 ans ? Il n’en est rien. La confrontation avec l’opinion des Belges pourrait aboutir à un fiasco pour « l’élite économique de la Flandre », qui s’est transformée en fossoyeurs de la Belgique. Ils préfèrent un vote particrate au parlement. On ne peut leur donner tort vu la petite minorité qu’ils représentent.
Selon ces nationalistes flamands, la Belgique constitue le grand problème. Le B.U.B. se demande si ce n’est pas exactement l’inverse. Nous estimons au contraire que ce sont les séparatistes qui créent les problèmes en Belgique. A partir du moment où ils ont commencé à se mêler de la politique belge, les problèmes communautaires se sont succédés, ce qui a exacerbé la crise dans notre pays depuis les années ’70. Le comble de ce drame national est le fait que ce soit ceux qui ont réformé notre Etat sans jamais consulter les citoyens viennent maintenant nous expliquer que leur système ne fonctionne pas et qu’il faut donc supprimer la Belgique. Il faut oser.